En plein débat sur le lien entre la culture et le pacte social (réunion du 13 février avec la Ministre suite aux tragiques événements de janvier) et après la présentation de la communication relative à l’art et la culture à l’école par les ministres de l’Éducation Nationale et de la Culture au dernier Conseil des Ministres du 11 février 2015, la CFDT-Culture considère que le sujet des droits culturels doit être un préalable à toutes discussions sur la diversité culturelle et sur le « vivre ensemble ».
Le 27 janvier, dans le cadre des discussions sur la loi « NOTRe » (Nouvelle Organisation Territoriale de la République) le Sénat a adopté un amendement (n° 614) à l’article 28 A, rédigé ainsi « Sur chaque territoire, les droits culturels des citoyens sont garantis par l’exercice conjoint de la compétence en matière de culture, par l’État et les collectivités territoriales ».
Cet amendement a été malheureusement rejeté début février par la Commission des Lois de l’Assemblée nationale sous l’argument que les droits culturels sont déjà régis et encadrés par d’autres textes. Rappelons que l’ajout de ce court amendement n’était pas anodin dans le contexte de la suppression de la clause de compétence générale Culture lors de l’adoption de la loi MAPTAM (Modernisation de l’action publique territoriale et de l’affirmation des métropoles) fin 2014, dispositif contre lequel nous nous étions déjà prononcés.
C’est quoi les droits culturels ?
L’article 5 de la Déclaration universelle sur la Diversité Culturelle de novembre 2001, rappelle que « les droits culturels sont partie intégrante des droits de l’homme, qui sont universels, indissociables et interdépendants, l’épanouissement d’une diversité créatrice exige la peine réalisation des droits culturels, tels que définis à l’article 27 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et aux articles 13 et 15 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux culturels. Toute personne doit ainsi pouvoir s’exprimer, créer et diffuser ses œuvres dans la langue de son choix et en particulier dans sa langue maternelle ; toute personne a le droit à une éducation et une formation de qualité qui respectent pleinement son identité culturelle ; toute personne doit pouvoir participer à la vie culturelle de son choix et exercer ses propres pratiques culturelles, dans les limites qu’impose le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales ».
En 2005 la Convention de l’UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles précise en enrichit la déclaration universelle sur la diversité culturelle de 2001 et pose « l’exception culturelle » à la française.
En 2007 la Déclaration de Fribourg sur les droits culturels promeut la protection de la diversité et des droits culturels au sein du système des droits de l’homme. Cette Déclaration rassemble et explicite les droits culturels déjà définis de manière éparse dans de nombreux textes internationaux.
Ce sont ces textes fondateurs qui permettent à chacun de nous de participer à la vie culturelle et de défendre la diversité culturelle.
Le rejet de l’amendement pose un grave problème de cohérence par rapport aux textes fondateurs existants. Cette décision pourrait, en effet, nous laisser penser que la signature de textes internationaux n’engage pas le Ministère à en respecter les clauses. Car bien que les droits culturels soient régis et encadrés par d’autres textes comme l’a rappelé la Commission des Lois, il n’en demeure pas moins essentiel, à l’heure où l’on clame et acclame la liberté d’expression et que l’on insiste sur la nécessité de faire de la culture un des dispositif clef du vivre-ensemble, d’en réaffirmer les principes dans un texte proposant une nouvelle organisation du territoire.
La CFDT-Culture considère que la ratification par la France des textes de l’UNESCO précités oblige l’État Français et le Ministère de la Culture à réaffirmer les droits culturels comme des droits fondamentaux de l’homme. Le Ministère absent des débats semble être en panne d’idées sur le sujet et ne pas mesurer les enjeux nationaux et internationaux de l’acception de ces droits.
Ne pas inscrire les droits culturels dans la loi c’est cautionner le désengagement de l’État en matière de politiques culturelles.
Nous attendons du Ministère de la Culture qu’il se positionne politiquement sur ce thème car cet amendement doit être rediscuté dans les jours qui viennent.
Il est indispensable que les députés et le gouvernement réintroduisent la notion de droits culturels dans la loi NOTRe afin de garantir la diversité culturelle sur l’ensemble du territoire.
Paris le 19 février 2015