Déclaration liminaire au CSA M du 9 février 2024

Déclaration

Madame la Ministre,

Vous présidez pour la première fois le comité social d’administration ministériel. Nous espérons que votre mandat sera marqué par un dialogue social renouvelé et fécond, en rupture avec le passé récent.

Nous souhaitons à cette occasion vous faire part de nos analyses concernant l’état du ministère de la Culture dont vous prenez la direction et de la vision qu’a le syndicat CFDT-CULTURE du secteur culturel, en particulier du service public de la Culture.

Dans le ministère que vous rejoignez, les personnels sont particulièrement investis et enthousiastes, conscients de leur rôle sociétal primordial. Experts qualifiés et expérimentés, les personnels sont soucieux de l’intérêt général, du service public, et sont très réactifs face au changement et aux imprévus.

Pourtant, tous ces agents sont particulièrement inquiets de l’avenir dans lequel s’inscrit ce ministère. S’il se revendique ministère de métiers, il prend pourtant progressivement le chemin d’un ministère de gestion, renforçant la logique technocratique. Il abandonne peu à peu l’action et l’expertise en choisissant de laisser disparaître les secrétaires de documentation, les techniciens de recherche, les ingénieurs de recherche, les inspecteurs et conseillers de la création. Il choisit malheureusement la précarisation dérégulée des emplois, qui nuit aux missions historiques du ministère fondé par Malraux ; il laisse se dégrader de façon préoccupante la qualité de vie au travail qui est amplifiée par la réduction de l’emploi et l’absence d’une vision ambi-tieuse au service de la République.

Le ministère de la Culture repose sur l’expertise de l’ensemble de ses agents, dans tous les domaines et à tous les niveaux qui s’appuie sur la spécificité historique de sa construction tardive à partir de 1959.

La CFDT-CULTURE déplore la précarisation des emplois recourant toujours davantage aux CDD et aux contrats courts et généralisant progressivement l’externalisation, y compris dans les secteurs métier indispensables à la mise en œuvre des politiques culturelles. Là où les évolutions sociétales et technologiques devraient amener la création de nouveaux métiers, de nouvelles formations, notamment dans le domaine de la médiation culturelle et des nouvelles technologies, le ministère de la Culture rabote ses ambitions en restreignant toujours plus ses filières métier et les déroulements de carrière.

Les réformes structurelles des dernières années, ainsi que la crise de la Covid-19, ont dégradé la qualité de vie au travail dans des proportions qui deviennent préoccupantes pour l’accomplissement même des missions du ministère.

Rappelons-nous que la fusion des régions a engendré celle des services déconcentrés de l’État dans les territoires. Ils ont été réorganisés de façon hétérogène et avec des résultats mitigés : aujourd’hui, de nombreuses DRAC traversent des crises, parfois violentes et préjudiciables à l’exercice des missions de service public. L’autorité du ministère de la Culture sur les DRAC, discutée par les préfets, doit être réaffirmée.

Comme vous le savez, madame la Présidente, le secteur culturel est fondamental pour notre pays. Il pèse à peu près 45 milliards d’euros, représentant 2 % du PIB et 2,7 % de l’emploi. Les branches principales de la culture sont : l’audiovisuel, le spectacle vivant et le patrimoine. Il doit être considéré comme une priorité des politiques publiques conduites dans ce pays. Le service public de la Culture est sans aucun doute une exception française, mais les citoyens de ce pays souhaitent la voir consolidé et affirmé, comme tous les services publics.

La CFDT-CULTURE, au sein de la confédération CFDT, premier syndicat français, entend contribuer au renforcement et au développement de la culture sur les territoires. Elle est convaincue de sa nécessité et de son rôle essentiel pour la citoyenneté et l’épanouissement de chacun et chacune d’entre nous. Elle souhaite pour cela que le ministère de la Culture demeure l’acteur essentiel de la mise en œuvre des politiques publiques de la Culture, en lien avec les collectivités territoriales.

Dans ce sens, il est indispensable que soient davantage accompagnés et renforcés les établissements d’enseignement supérieur architectural, artistique et culturel. Ils traversent depuis maintenant plusieurs années des crises successives qui alertent sur leur situation préoccupante. Nationales ou territoriales, les écoles ont plus que jamais besoin d’une mise à niveau de leurs moyens humains, infrastructurels et budgétaires pour ne pas être déclassées face aux universités.

Les établissements dédiés au spectacle vivant et à la création connaissent une situation similaire : affectés par « l’effet ciseau », dû à la stagnation des subventions publiques (voire à leur baisse), à la hausse des coûts de l’énergie et à la nécessaire augmentation des salaires ; ils sont aujourd’hui dans une situation de grande fragilité à laquelle des réponses doivent être apportées.

Les artistes de notre pays en subissent les contrecoups en voyant leur activité diminuer de façon significative et craignent les évolutions futures du régime de l’intermittence du spectacle.

Aussi, la CFDT-CULTURE attend-elle de votre part, madame la Présidente, une prise en compte énergique de ces problématiques pour développer un ministère efficace et ambitieux, assumant avec détermination le rôle social de la Culture. Pour cela, elle propose la tenue d’assises de la Culture réunissant politiques, cadres des établissements, directions et services du ministère, experts et organisations syndicales pour concevoir et construire l’avenir des missions du ministère et de ses moyens.

Où que vous alliez, Madame la Présidente, vous trouverez dans ce ministère un engagement sincère et général de démocratisation culturelle au service de la République. Les revendications répétées de davantage de moyens humains, financiers et organisationnels, d’emplois pérennes, de meilleurs déroulements de carrière, sont à la mesure de cette implication de tous.

Dans ce sens, la CFDT-CULTURE revendique l’installation d’un CSA ministériel dédié à la conception et à la mise en oeuvre des politiques culturelles du ministère de la Culture.

Paris, le 9 février 2024