Déclaration liminaire CFDT-CULTURE au CSA commun des ENSA du 22 mai 2024

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Madame la Présidente du CSA commun des ENSA,

Aujourd’hui, nous devons aborder des enjeux capitaux des Écoles nationales supérieures d’architecture. En déplorant l’absence de points « pour avis » à cette instance, hormis la validation des procès-verbaux, nous soulignons l’importance de discuter des sujets essentiels qui concernent ces institutions phares de notre Ministère. La densité de l’Ordre du jour est telle que nous insisterons ici sur la recherche.

Nous remercions d’abord l’administration pour la qualité de la documentation transmise, et nous félicitons de ce que la rémunération des étudiants bénéficiant de contrats doctoraux accordés par le ministère de la Culture soit, enfin, la même que celle de leurs pairs à l’université. Le travail et l’engagement des doctorants doivent être reconnus et valorisés. Les missions supplémentaires qu’ils assument doivent être justement rémunérées pour garantir leur motivation et la qualité de leur contribution.

C’est aussi le mode d’attribution de ces contrats doctoraux qui pose problème, un point sur lequel l’ensemble des organisations syndicales vous interpelle sans relâche (et sans effet) depuis la publication des décrets de 2018. En effet, deux types de difficultés viennent se cumuler :

  • d’une part le nombre de contrats, sur lequel le ministère s’était engagé (20 temps plein par an) et qui n’a pas été respecté.) Le document que vous nous avez adressé indique le nombre de 44 contrats financés, mais tous ne sont pas à à taux plein. Nous assistons en effet à une hausse des « demi-contrats », une pratique qui n’a guère cours à l’université ;
  • d’autre part le principe de sélection des candidats à un financement doctoral. Rappelons qu’il est organisé en deux temps : au niveau local, les Commissions de la recherche de chaque ENSA doivent classer ces candidats, ce qui se traduit par une compétition interne entre directeurs de thèse, et ne peut qu’envenimer les tensions dans un contexte déjà trop contraint (notamment du fait de la gestion de la pénurie de décharges recherche). Ensuite, au niveau national, une commission ad hoc, composée par le ministère de personnes aux attributions purement administratives, opère une sélection selon des critères opaques, puisque leur pondération n’est jamais explicitée. Cerise sur le gâteau, les sujets entrant dans la « stratégie nationale » (non pas scientifique, mais politique) du ministère sont, nous dit-on, privilégiés. Cela revient à éliminer toute recherche fondamentale, pour ne soutenir que des projets qui pourraient par ailleurs trouver des financements.

Nous pensons ici aux Cifre, considérés comme la panacée, qui consistent à transférer au privé, moyennant un important cadeau fiscal aux entreprises, une action de formation d’intérêt national, et ce au risque de mettre en jeu l’indépendance scientifique des doctorants. En outre, les procédures de contractualisation extrêmement complexes requises par l’ANRT, combinées à l’insuffisance notoire des postes ATS dans les ENSA, rendent l’aboutissement des dossiers très difficiles, voire impossibles. Les chercheurs passent plus de temps à chercher des financements qu’à leurs travaux de recherche – et ce d’autant plus qu’un nombre croissant d’écoles doctorales refuse d’inscrire des étudiants qui n’ont pas trouvé de financement dédié.

Si l’on ajoute à cela les tensions générées, outre par le manque de décharge pour recherche, la situation, très hétérogène selon les écoles, des ingénieurs d’étude ou de recherche du ministère de la Culture, et les inquiétudes concernant les regroupements universitaires : c’est tout le système de la recherche en architecture qui est grippé, faute de respect des engagements qui avaient été pris lors des décrets de 2018 qui reconnaissaient pourtant, rappelons-le, un statut d’« enseignants-chercheurs ».

Par ailleurs :

Les conditions de travail des agents administratifs, techniques et de service sont une priorité. La stabilité apparente des ETP autorisés masque souvent des fluctuations et une instabilité qui affectent directement la qualité du service fourni et le bien-être des agent.e.s. Nous revendiquons donc des conditions de travail équitables et une valorisation réelle de la fonction des ATS.

Les enseignants contractuels méritent une attention particulière. Nous demandons la fin de la précarité de leur statut. La reconnaissance de leur engagement et de leur expertise doit se traduire par des contrats stables et sécurisants.

Les variations dans les promotions et les avancements reflètent souvent des politiques internes opaques. Nous demandons plus de transparence et d’équité dans ces processus. Les décisions doivent être basées sur des critères clairs et justes afin de garantir un environnement de travail stable et motivant. Cela est crucial pour la rétention des talents et l’efficacité organisationnelle.

Enfin, les investissements immobiliers doivent répondre, de manière transparente et concertée, aux besoins urgents des utilisateurs. La hiérarchisation des besoins en termes d’investissement doit prioriser la sécurité, l’accessibilité et la modernisation des équipements. Il est essentiel d’inclure toutes les parties prenantes dans ce processus, les représentant.e.s des personnels et des étudiant.e.s, dans la planification et la mise en œuvre des projets immobiliers. Un environnement de travail et d’étude adéquat est indispensable pour garantir la qualité et l’efficacité de nos missions.

Les regroupements universitaires des ENSA comportent des avantages réels, tels que l’accès aux fonctions support (immobilier, services aux étudiants) et des opportunités de recherche nouvelles. Mais les écoles sont confrontées à diverses formes de regroupements, allant de la formation de grands établissements à des établissements publics expérimentaux en passant par des Communautés d’Universités et d’Établissements et des associations territoriales. Ces défis incluent la perte d’autonomie budgétaire et administrative et la complexité d’intégration structurelle. Nous insistons sur la nécessité de préserver l’identité juridique des ENSA et revendiquons un dialogue social constant pour assurer une transition transparente sur cette question.

En conclusion, nous devons faire face à des préoccupations urgentes : la gestion des ressources humaines et financières pour les doctorants, la pérennisation des emplois des enseignants contractuels, l’amélioration des conditions de travail des ATS, ainsi que la priorité accordée aux opérations immobilières des ENSA. Nous devons travailler ensemble pour répondre efficacement à ces enjeux majeurs.