Ce 10 juillet, passait pour la troisième fois (après un vote unanime contre des organisations syndicales) devant le comité technique ministériel, le projet de décret relatif à l’établissement public Cité de la musique/Philharmonie de Paris. Ce texte consacre l’union, ou l’absorption de la Philharmonie par la Cité de la Musique pour ne plus former qu’un seul établissement. De fait, le décret de 1995 créant la Cité de la Musique est largement modifié.
Après des investissements financiers exorbitants pour construire et équiper la Philharmonie, on pouvait s’ attendre à un nouveau décret et des missions ambitieuses confiées à l’établissement dignes de cet investissement colossal.
Hélas, comme souvent ces derniers temps, la déception était au rendez-vous !!
Depuis l’arrivée de la gauche au pouvoir , nous n’avons cessé de marteler que la culture a un rôle primordial à jouer pour redonner du sens aux enjeux qui se nouent dans notre société, qu’on l’appelle « Vivre ensemble »ou « Culture et citoyenneté ». La culture est aujourd’hui un des socles sur lesquels notre république doit pouvoir reposer quand d’autres valeurs semblent s’effondrer.
Nos deux dernières ministres n’ont pas su s’emparer de cette ambition et la faire croître, y opposant systématiquement le diptyque « budget et économie ». La musique se cantonne-t-elle au binaire ??. Alors à quand la valse à 3 temps qui donne du sens au projet !!!
Nous ne pouvons plus souscrire et laisser tenir ce discours ! Cela nous empoisonne, lentement mais sûrement.
Il est temps de passer à une autre partition et de faire de la culture, des cultures, un nouveau socle, un nouveau tremplin ; cessons de jouer petit bras sur ce domaine !
Ce projet de décret sur la Cité de la Musique/Philharmonie est un texte de plus dans lequel on fait primer les rédactions « normées » et de « légistique » au détriment du fond et de la politique culturelle -que nous souhaitons ambitieuse- qui derrière sera/devrait être appliquée.
L’ambition annoncée du président et de la ministre de faire de l’Éducation artistique et culturelle (EAC) un axe majeur est réduit à son strict minimum , le terme EAC est même absent du décret, c’est déprimant, la déception est encore plus grande !
La Cité/Philharmonie est un opérateur national d’une importance stratégique primordiale pour le développement de la diffusion musicale en France et pour la diversité des publics, garantissant ainsi la multiplicité des expressions culturelles.
Notre syndicat a proposé des amendements, entre autres, dans le but de compléter les missions de l’établissement :
– une mission de coopération nationale portant sur la diffusion et sur la médiation musicales ;
– une mission territoriale en co-construction avec les partenaires locaux (avec le conservatoire, la grande halle, etc). Aucun de ces amendements n’a été retenu…
Ce lieu devrait mener à bien l’animation de la vie musicale (créateurs, interprètes et publics) rayonner et travailler en réseau avec les autres structures musicales françaises et étrangères.. Tous les professionnels de la musique vous attendent au tournant madame la ministre car ce lieu est un symbole au même titre que le festival d’Aix où vous allez, aujourd’hui, le jour même de l’ultime passage de cet texte devant les instances, faire des annonces en faveur de la politique musicale !
Par ailleurs, la Cité de la Musique abrite aussi et surtout le Musée national de la musique.
Or ce nouveau texte ne définit plus les missions du Musée, qui étaient pourtant clairement énoncées dans le décret de 1995.
Nous ne comprenons pas pourquoi ce qui pouvait être écrit en 1995 ne peut plus l’être aujourd’hui. Ce n’est pas non plus complètement révolutionnaire que de vouloir à ce que figure noir sur blanc dans le décret constitutif de ce nouvel établissement que le musée continue d’avoir des missions de conservation des collections nationales, ou qu’il a un rôle de conseil et d’animation du réseau des collections publiques dans le domaine de la Musique !
Dans cette suite, puisque les missions du musée ne sont pas assez « légistiques » semble-t-il, on fait aussi disparaître d’un trait de plume les personnels spécifiques et qualifiés qui y sont attachés. Cela relève d’une forme de logique qui ne peut que nous inquiéter… Quand on supprime dans un texte les missions et les personnels d’un musée, la disparition du musée elle même ne peut qu’être envisagée.
Nous regrettons également l’occasion manquée de profiter de la rédaction de ce décret pour créer un « Grand département Musique» auprès du Service des musées de France (SMF).
Le manque d’ambition se double là d’un manque d’anticipation et de concertation avec les personnels et les organisations musicales.
Le ministère a feint de découvrir cela lors du CTM du 24 juin… Si des réunions avaient été organisées en amont (nous ne comptons pas l’unique réunion organisée en urgence le 12 juin sous pression des organisations syndicales), si des échanges constructifs avaient pu avoir lieu dès lorsque le ministère avait décidé de la réécriture du décret, sans doute le ministère ne « découvrirait » pas aujourd’hui que la création de ce grand département a du sens pour le présent et pour l’avenir.
Ne le cachons pas, entre les épisodes sur le projet de loi relatif à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine (LCAP), la réorganisation de la DGCA qui annonce des heures sombres et maintenant ce texte, nous ne pouvons qu’être franchement déçus…
Soyons cependant précis : ce n’est pas le travail des agents qui ont œuvré à la rédaction et à la forme des textes que nous remettons en cause, c’est bien l’absence de volonté politique de la ministre que nous pointons ici.
Heureusement exercer la fonction de ministre ne s’apparente pas à donner un spectacle car nous serions tentés d’en demander le remboursement pour manque de professionnalisme (ce que vient de faire un finlandais).. ! Nous ferions peut-être des économies !!!
La CFDT-CULTURE
Paris, le 10 juillet 2015
CFDT-CULTURE : Fusion Philharmonie/Cité de la musique : une ambition en mode mineur !
Résultat du vote :
CGT : Pour
CFDT-CULTURE, SUD, UNSA/CFTC : Contre
FSU : Abstention
Dans l’épisode 5, Du bellâtre ou du bel art ?