Au fil des CE et des CA la Présidence n’a de cesse de nous alerter depuis le printemps – à juste titre – sur la situation dégradée de l’Établissement.
De 3,5 M€ de pertes annoncées à l’occasion de la décision modificative (DM) en mars, on est passé à 5 M€ puis à plus de 7 M€ de pertes annoncées ! Jusqu’où monteront-elles ? Dépasserons-nous les pertes historiques de 1996 : 86 millions de francs, soit 11 M€ ?
«Les résultats de l’établissement se sont dégradés cet été par rapport à la prévision présentée au Conseil le 23 juin dernier… la prévision de résultat annuel s’établit aujourd’hui à – 7,1 M€ (contre – 5 M€ prévus lors du conseil d’administration du 23 juin)…
La performance des activités de librairies-boutiques s’est dégradée ces deux dernières années, à la fois en termes de chiffre d’affaires (baisse du CA marchandises de 59,3 M€ en 2013 à 53,9 M€ en 2015) et de contribution avant coûts complets…
Le niveau de contribution nécessaire pour couvrir les coûts complets du siège (qui lesquels ont progressé de 4,6 à 5,9 M€ sur la période) n’est plus atteint depuis 2013…
À fin 2016, le chiffre d’affaires marchandises devrait s’élever à 44,5 M€. Si cette perte de CA s’explique largement par des événements exceptionnels (chute de 11,4 M€ de CA liée aux baisses de fréquentation et de 1,9 M€ à la perte des concessions du musée du quai Branly, de la Cité des sciences et du Palais de la découverte), elle révèle également l’incapacité du modèle actuel à absorber ce type de choc et la nécessité de l’adapter…
Le diagnostic opéré fait en effet apparaître un modèle de distribution lourd (ratios élevés de masse salariale / CA et de coûts centraux / CA), insuffisamment agile et dont la performance est perfectible». Sylvie Hubac, CA du 19 octobre.
Nous sommes début novembre et la montagne a accouché d’une souris. Les mesures prises sont bien loin d’être suffisantes et donc efficaces.
Un plan d’adaptation « Ambition DCM 2020 » a été présenté ; il s’organise autour de trois axes : optimisation de l’organisation et des processus, amélioration de l’offre et consolidation et développement de l’activité.
Il nous rappelle celui de 2014, initié afin d’obtenir le renouvellement de concessions-clés, redynamiser le chiffre d’affaires (refonte de l’offre et des dispositifs commerciaux) et d’optimiser la performance de l’activité (amélioration des marges sur les produits édités).
Manifestement il n’a pas fonctionné et vos élus CFDT, qui ont alerté il y a bien longtemps déjà (cf nos communications «Morne Plaine» 1, 2 et 3 d’octobre 2015 à mai 2016), craignent que celui présenté ne connaisse un sort tristement identique.
Pourquoi ? Car pour l’essentiel, il n’est qu’accumulation de demi-mesures et addition d’évidences et d’incantations, ainsi de l’absurde augmentation de 20% du CA de la direction commerciale et marketing (DCM) en 2017 : avec quels moyens ?
Les 11 chantiers lancés se révèlent in fine des points de détail au regard de l’ensemble des dysfonctionnements qui dans leur grande majorité sont la conséquence du choix d’un outil informatique inadapté, associé à une organisation et des processus non opérants. Ajoutons à cette aberration la décision coûteuse de migration Raymark, outil qui ne tient pas ses promesses.
La CFDT s’interroge également fortement sur la pertinence de confier la tâche du redressement à ceux-là mêmes qui sont pour une part à l’origine des difficultés ou qui n’ont pas mis en œuvre les plans de redressement précédents (par exemple l’audit à Garonor en 2009 qui aboutissait aux mêmes préconisations que celui mené cette année).
Ils n’ont pas pu ou su les voir, puis y faire face, or, gouverner, c’est prévoir. Sauront-ils aujourd’hui engager des mesures à la hauteur de la situation et se les appliquer à eux-mêmes ? Pourquoi ne pas l’avoir fait par le passé ? Pourquoi le feraient-ils cette fois ?
En outre, une autre menace se profile
L’article du Monde daté du 28 octobre « Bernard Arnault agite les musées »1 montre, à l’occasion de l’exposition Chtchoukine, que le modèle classique de nos expositions à beaucoup à craindre.
Ajoutons à cela que la fondation Pinault sera active en 2018 alors que le Grand Palais fermera ses portes en 2020 durant trois années pour travaux… La concurrence est forte, elle va devenir rude.
Qu’on le veuille ou non, notre secteur d’activité est aujourd’hui une industrie culturelle.
Notre modèle économique est épuisé : la DCM ne parvient pas à assainir sa situation depuis longtemps, l’Etat ne joue pas son rôle d’arbitre même sur ce qui concerne nos missions de service public (cf. médiation culturelle ou Agence photo), nos concurrents pour les espaces commerciaux sont plus efficaces et moins chers.
Bien sûr notre Etablissement a des atouts et des compétences.
Mais il est nécessaire de mener une réflexion sans tabous et de mettre en œuvre des mesures fortes faute de quoi notre public se rendra prioritairement dans les fondations privées, aux moyens considérables, voir des expositions plus riches et novatrices et nous continuerons à perdre d’autres espaces commerciaux…
CFDT-Culture, section RMN-GP, le 02 novembre 2016
Télécharger le communiqué : CFDT-CULTURE – RMN-GP : la montagne et la souris
(1) Article du Monde