Aujourd’hui se tient -sauf ajout de dernière minute d’un autre CTM- le dernier comité technique ministériel de cette mandature présidentielle [nota : un CT ministériel est ajouté le 18 avril].
Il y a 5 ans, la fin de l’ère Sarkozy nous avait fait espérer un renouveau pour les politiques culturelles. Au-delà des simples promesses de campagne, on sait ce qu’elles valent, nous imaginions, nous rêvions d’un ministère fort, impliqué, moteur d’un projet de société et pour le ministère lui-même, en ligne de mire, la fin de la RGPP.
« La culture, c’est l’avenir, c’est le redressement. La crise ne rend pas la culture moins nécessaire, elle la rend plus indispensable », avec une telle déclaration par le premier ministre d’alors, nous avions bon espoir de retrouver un ministère ambitieux.
L’annonce du budget à l’automne 2012 a très vite calmé cette belle ambition : la crise, c’est la crise et la politique d’austérité est bel et bien passée par le ministère de la Culture, plutôt deux fois qu’une.
Dès début 2013, nous dressions un constat alarmant, tant sur les politiques culturelles en berne que sur les menaces multiples que la baisse du budget faisait peser sur le ministère en terme d’emploi, de missions, de conditions de travail, etc.
Dans la série, on n’avait pas assez d’ennuis, aux baisses enchaînées de budgets à la baisse, (2013, 2014, 2015), s’est ajoutée la réforme territoriale qui s’est abattue sur les DRAC aussi vite qu’elle a été annoncée. Malgré une forte mobilisation, la voix des agents n’a pas été entendue. L’impréparation faisait entrevoir des dysfonctionnements, les craintes ont été balayées par la « nécessité absolue de changement », il fallait s’adapter, point. Les épisodes – à tiroir- de la communication des fameux organigrammes cibles des « nouvelles drac » auraient pu nous valoir une bonne tranche de rire si les enjeux n’avaient pas été aussi importants : d’une instance à l’autre, les organigrammes différaient, tant dans leur présentation, que dans le nombre d’agents concernés.
La tension engendrée pour les services à travailler à cette réforme n’est jamais retombée et le CT spécial DRAC du 29 mars (il y a deux jours) a encore une fois été l’occasion de faire un bilan des dysfonctionnements qui persistent.
Nous ne reviendrons pas sur sur le feuilleton à rallonge de ce qui est devenu la loi relative à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine (LCAP), qui fut d’abord une loi Patrimoines et Loi d’orientation de la création artistique, et qui a abouti un projet mal taillé. La fusion de deux projets de lois distinctes à l’origine ne permet pas d’identifier les vrais enjeux de la culture de demain à l’heure de la décentralisation, du numérique et de l’Europe.
Cette juxtaposition favorise la confusion, les dérives contre productives et les manques qui interrogent sur le but même de cette loi et son application effective. Cette loi tant attendue et désirée par l’ensemble des acteurs culturels se voulait ambitieuse et vertueuse, malheureusement elle est loin de susciter l’enthousiasme tant elle est déséquilibrée, saucissonnée dans sa construction même. Cette loi à orientation essentiellement libérale a raté son rendez-vous avec l’histoire du service public de la Culture !
L’un des autres feuilletons qui aura traîné sur l’ensemble du quinquennat, c’est bien évidemment la sortie du dérogatoire ! Depuis novembre 2012 que cette suite logique de la loi 2012-347 nous était annoncée « pour le mois prochain »… Évidemment, sur ce sujet, le MCC n’est pas le seul coupable à avoir lanterné, néanmoins on ne peut pas dire qu’il aura été moteur sur son propre périmètre/ Et aujourd’hui encore, alors que c’était un engagement, nous n’avons toujours pas la fameuse liste des emplois dits 4-1. Sans doute est-ce là aussi pour le mois prochain.
On voit là, l’écueil majeur de ce mandat : la conception du dialogue social au MCC.
On en aura sans doute jamais autant parlé, il y a même une adresse mail (!), pour en faire aussi peu. Vous nous répondrez que vous organisez une foultitude de réunions. On ne peut pas le nier, nos agendas fourmillent de réunions : des réunions d’où nous ressortons sans éléments qui permettent d’avancer, des réunions où nous ne rejouons pas la réunion précédente, des réunions qui reviennent en arrière faute d’arbitrage ou parce que l’arbitrage a changé… Et surtout des réunions dites de concertation qui ne sont en fait que des réunions d’information, où les choses sont bouclées et où l’administration, toujours polie, se borne à nous écouter patiemment mais sans nous entendre. Nous sommes les alibis ou la caution dont l’administration a besoin pour dire dans son bilan social qu’il y a eu du « dialogue »… On remplacerait avantageusement « social » par « sourd » et on y gagnerait de la sincérité.
Pas faute là encore d’avoir tiré la sonnette d’alarme !
L’autre maître mot de ce « dialogue » est transparence entre autre transparence des régimes indemnitaires, avec la mise en place du RIFSEEP, Là encore, la réalité n’est pas au rendez-vous du vocabulaire employé ! Nous vous l’avons déjà dit, et nous y reviendrons dans le point qui va être débattu sur le bilan de la filière administrative, ce dispositif est à peu près aussi transparent qu’une motte de beurre étalée sur une vitre.
Nous ne ferons pas ici une liste de ce qu’il reste à construire dans ce ministère, nous verrons cela après le 11 juin, mais pour ne pas terminer sur une note complètement négative, nous n’oublions pas que nous avons quand même signé quatre textes importants durant ce quinquennat : la revalorisation des corps des métiers d’art pour commencer, l’accord de méthode, la charte sociale et le retour à la règle.
Ces quatre textes prouvent que nous sommes en capacité de trouver des points d’accords sur des textes structurant pour le ministère et surtout pour ses agents.
Il y a néanmoins un petit bémol, c’est bien évidemment l’application et le suivi de la mise en œuvre de ces textes… en particulier dès qu’il fut travailler avec les établissements publics )dont le ministère a la tutelle…
Pour terminer, peu importe que trois ministres se soient succédées durant ce quinquennat, car s’il y avait eu des idées ou un projet culturel fort, ceux-ci auraient pu être portés au-delà des personnes.
Mais c’est bien l’absence à la fois de volonté politique et d’ambitions pour notre ministère qui aura marqué ces cinq ans et restera le seul héritage des trois ministres.
CFDT-Culture, le vendredi 31 mars 2017
Télécharger la déclaration : CFDT-CULTURE – Abyss : un ministère en eaux profondes. Déclaration au CTM du 31 mars 2017