Les Archives nationales à l’heure managériale : à propos de la journée des Archives nationales du 19 juin 2018

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Le 8 mars dernier, la directrice des Archives nationales (AN) adressait à l’ensemble des agents des AN une invitation à participer à la « Journée des Archives nationales » qui doit se tenir mardi 19 juin à Pierrefitte-sur-Seine, date à laquelle les deux salles de lecture de Paris et de Pierrefitte seront, pour l’occasion, exceptionnellement fermées.

Cet événement, présenté comme découlant de souhaits exprimés par de nombreux agents, notamment « dans le cadre de l’étude sur l’attractivité et le fonctionnement » des Archives nationales, sera, indiquait la directrice, « l’occasion d’échanger sur les grandes orientations de notre institution et de tracer des pistes pour améliorer nos méthodes et notre manière de fonctionner. Il constituera également un moment de convivialité permettant à tous de mieux se connaître. »

Chaque agent était dans le même temps invité à faire part par écrit « des questions qu’il souhait[ait] poser à la direction », l’ensemble des réponses à ces questions devant faire « l’objet d’un document remis à chacun lors de la journée du 19 juin. »

Le 25 avril, la directrice des Archives nationales communiquait aux agents le programme de la journée, en leur précisant : « Je vous rappelle que la présence à cette Journée est obligatoire pour tous les agents en service le 19 juin ».

Entre le 30 avril et le 22 mai, les agents étaient destinataires de 4 nouveaux messages leur communiquant le programme de la journée et leur demandant de s’inscrire aux divers ateliers et tables rondes organisés. Le dernier de ces messages (22 mai) précisait : « Au-delà de cette date, les agents ne s’étant pas manifestés seront inscrits d’office dans des tables rondes ou ateliers en fonction des places disponibles. Nous vous rappelons que votre présence à cette journée est obligatoire. »

Pour l’heure, le programme de cette journée prévoit :

  • le matin, une séance plénière dans l’auditorium avec information sur les projets en cours ou à venir, temps d’échanges avec l’équipe de direction, réponse aux questions ;

  • l’après-midi, participation « à la table ronde1 ou à l’atelier de découverte2 pour lesquels vous vous serez inscrits », puis restitution des tables rondes dans l’auditorium ;

  • après quoi, « pour clore cette première Journée des Archives nationales  vous pourrez participer à un tournoi de baby foot, de ping pong ou encore à un karaoké. »

***

Le principe et les modalités d’organisation de cette « journée » (destinée manifestement à être renouvelée), conçue dans le cadre de l’assistance à maîtrise d’ouvrage (AMOA) « Attractivité et fonctionnement des Archives nationales » actuellement conduite par la société Eurogroup Consulting, soulèvent un certain nombre de questions.

Nous passerons sur le (nouveau) jour de fermeture des salles de lecture qu’elle implique pour le public extérieur.

On ne peut tout d’abord manquer de s’interroger sur cet exercice mêlant information et communication institutionnelles, dans une expérience de « démocratie directe » entre direction et agents qui n’est pas sans évoquer la marginalisation des instances et corps intermédiaires à l’œuvre à l’échelle nationale.

On peut par ailleurs fortement douter que l’importation des méthodes managériales du secteur privé soit de nature à apporter des solutions aux problèmes d’attractivité et de fonctionnement déjà bien connus et identifiés des Archives nationales (et dont un certain nombre ne sont pas du ressort des AN) : conditions de vie et de travail sur le site de Pierrefitte, écarts de rémunération avec d’autres ministères, conséquences de la fermeture de Fontainebleau sur la charge de travail des équipes, travaux sur les bâtiments et nuisances induites, etc.

Enfin, la CFDT-Culture, section Archives, ne peut que dénoncer le caractère obligatoire de la participation à cette journée et la pression exercée sur les agents afin qu’ils s’inscrivent à ses tables-rondes et ateliers. De fait, le mélange des genres : travail/communication/convivialité pseudo-festive imposée a pu heurter, et on ne peut qu’observer le taux élevé de jours de congé posés pour cette date.

Le besoin de moments d’échanges à l’échelle de l’institution est indéniablement partagé par un nombre significatif d’agents des AN. Toutefois, la convivialité ne peut pas être imposée (rappelons en outre qu’il existe déjà les vœux de début d’année pour cela). Quant au « mieux travailler ensemble », il passera moins par de l’événementiel interne (ou internalisé), que par le renforcement pérenne des équipes en sous-effectif, par l’amélioration de la diffusion de l’information (encore trop cloisonnée par site et par direction, notamment DIRP/DIRF), et par le lancement de chantiers et projets de fond, notamment scientifiques, associant les divers sites, services et directions.

1 Exemples de tables rondes : Assurer la dynamique des AN sur leur territoire ; Les tâches dont on ne parle pas : comment les rendre visibles ? ; Porter, s’approprier l’image de notre institution…

2 Exemples d’ateliers découverte : La paléographie pour tous ! ; Héraldique ; « Fabrique ta boîte »…

La CFDT-CULTURE, sections Archives
le 15 juin 2018

Télécharger le communiqué : CFDT-CULTURE : Les Archives nationales à l’heure managériale. À propos de la « journée des Archives nationales » –15 juin 2018