CFDT-FONCTIONS PUBLIQUES – Pourquoi la CFDT n’appelle-t-elle pas à une journée intersyndicale de grève et de manifestation le 22 mars ?

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Les agents, voire les adhérents et les militants, attendent des mobilisations intersyndicales, pour apparaitre « plus forts».

Vrai si les syndicats se sont entendus sur des revendications communes aussi précises que possible, qu’ils seront alors plus forts à porter ensemble. Actuellement, c’est notamment le cas de l’intersyndicale sur les services à domicile et établissements pour personnes âgées. Et, pour l’ensemble de la fonction publique, cela a été le cas le 10 octobre 2017.

Faux si l’intersyndicale porte un « fourre-tout » revendicatif (« Non aux suppressions de poste ! ») ou des revendications floues et/ou inatteignables (+10% d’augmentation du point d’indice pour rattraper des années de gel, en omettant PPCR au passage), auxquelles le gouvernement aura beau jeu de ne pas répondre ou alors a minima. La responsabilité de l’échec risque alors de se retourner plutôt contre « les syndicats » que contre le gouvernement.

On ne peut pas toujours être en intersyndicale : les analyses et les positionnements revendicatifs ne sont pas toujours les mêmes.

La CFDT porte un syndicalisme de transformation sociale, à la fois combatif et constructif. Cela implique d’être ouverts, d’écouter, et d’entendre à la fois les demandes des agents que nous représentons et des publics au service desquels nous sommes, en intégrant les contraintes fixées par le législateur et les impératifs des employeurs, en gardant pour cap à la fois l’intérêt des agents et l’intérêt général.

La CFDT s’est construite en réaction au syndicalisme révolutionnaire, basé sur la lutte des classes et le « grand soir ». En réalité, ce syndicalisme protestataire aboutit souvent au conservatisme et à l’immobilisme, tout en proclamant que l’existant est insupportable !

Le syndicalisme CFDT est exigeant car il ne se contente pas de dénoncer les injustices :
il élabore des propositions, argumente et négocie et sait aussi appeler les agents à la mobilisation quand il le faut.

Nous voulons de réels progrès dans la vie au travail des agents : comment les obtenir ?

Par la négociation ! Tous ceux qui mènent des négociations, dans leurs entreprises, leurs administrations, leurs établissements, en éprouvent la complexité et la difficulté. Mais négocier, c’est défendre et améliorer concrètement la situation des agents.

Pour l’instant, le gouvernement n’a fait que des annonces, certes provocatrices et méprisantes pour plusieurs d’entre elles. Mais il a commencé à rétropédaler sur le plan de départs volontaires et le recours aux contractuels. Et il propose une année de concertation. Faut-il refuser de négocier parce qu’on se méfie ? Sans naïveté et avec responsabilité, nous participerons à la concertation.

Négocier, cela exige aussi que nous sachions communiquer sur nos propositions et positions tout au long du processus. Nous en avons conscience et nous engageons à le faire.

Par la manifestation et aussi la grève quand elle s’impose. Inverser le rapport de forces en notre faveur demande la mobilisation du plus grand nombre. 400 000 manifestants : c’était le nombre de manifestants le 10 octobre dernier et c’est environ le nombre d’agents publics adhérents à un syndicat. Le gouvernement peut alors facilement nous rétorquer que les syndicats ne représentent qu’eux-mêmes. Nous courrons le risque de l’affaiblissement si on n’apporte pas la preuve que l’on peut mobiliser au-delà de ce chiffre.

À l’évidence, il en faut (beaucoup) plus pour faire « plier » le gouvernement. La grève et la manifestation, dont on ne peut pas user trop souvent, demandent donc d’être soigneusement préparées, avec un mot d’ordre clair et mobilisateur, pour avoir une chance de succès. Gardons notre capacité à manifester pour plus tard, laissons d’abord la négociation se dérouler et sachons conserver nos forces en cas de blocage fort ou de décisions inacceptables sur un point ou un autre.

Les militant.e.s qui veulent rejoindre l’intersyndicale pensent-ils pouvoir mobiliser beaucoup d’agents ? Les agents qui réclament des manifestations unitaires sont-ils prêts à y participer ? Le temps n’est plus aux manifs par procuration, où les militants et adhérents manifestaient POUR les agents ; pour peser, les agents doivent être dans la rue AVEC nous : y sont-ils prêts ?

Attention aux manifestations où, faute de mot d’ordre clair, les fonctionnaires seraient vus par la population comme défendant leurs soi-disant privilèges, et leurs syndicats comme rétrogrades, réfractaires à tout changement, à toute modernisation.

Ces dernières années, nous avons davantage obtenu par la négociation (PPCR par exemple, y compris le dégel du point d’indice) que par les défilés de rue.

En année électorale, n’avons-nous pas plus à gagner à nous différencier des autres syndicats, en présentant aux agents la démarche du syndicalisme CFDT ? Sinon, pourquoi voteraient-ils pour nous ?

Il nous faut, tout au long de l’année, faire mieux connaître notre syndicalisme, nos oppositions, nos revendications, nos propositions et nos positions.

A nos yeux, les conditions de la réussite de la manifestation du 22 mars 2018 ne sont pas encore réunies, c’est pourquoi nous n’y appelons pas.

CFDT-FONCTIONS PUBLIQUES, le 5 mars 2018